Emmaus. S. Petrone

Emmaus, synthèse de l’Evangile

Le récit d’Emmaüs est la synthèse de l’Evangile, le début d’un nouveau départ, qui continuera dans le livre des Actes. Le voyage de Jésus vers Jérusalem est le thème de l’Evangile. Dans les Actes le voyage est de Jérusalem vers le monde entier, avec la présence du Ressuscité.

 C’est l’image du pèlerinage que j’ai vécu au mois de janvier dernier:  un voyage vers Jésus pour approfondir, avec une trentaine d’amis, ma relation avec lui. Puis on est renvoyé là où on vit, dans le monde entier, car les pèlerins sur ce chemin viennent de partout.

Tout ce qui est important pour Luc est présent ici: le voyage, la visite, la rencontre, le dialogue, les questions, la table, Jésus sera-t-il reconnu ou non? C’est comme un résumé de son évangile.

La construction est très précise. Jésus apporte la lumière aux questions et ouvre les yeux. La première partie est obscure, la fin est lumineuse, avec la joie de Pâques. On sort d’une vallée obscure. Jésus donne cette lumière. Emmaüs est comme une illustration du Psaume 23: le Seigneur devient le berger de ces deux disciples.

Le deuxième disciple n’est pas nommé. Sans doute Luc désire qu’on s’y identifie. Certains l’ont identifié avec la « Marie, femme de Cléophas », au pied de la croix. Selon la tradition orthodoxe il serait l’évangéliste Luc lui-même.

« Ils parlaient et discutaient« . Ils sont complètement pris par ce qui vient d’arriver. Quand quelque chose de fort survient dans notre vie, on ne voit plus rien d’autre. N’est-ce pas ce qui nous arrive avec la pandémie actuelle: les médias font tout tourner autour d’elle. Ils colononisent notre esprit. Il s’agit alors de prendre de la hauteur. Et la Parole de Dieu nous y aide. sans elle, nous courrons à la ruine spirituelle.

 

S’approcher et faire route

Dans cette situation Jésus « s’approche et fait route avec eux« . Méditons ces deux expressions! Il n’impose rien. Il s’approche comme le bon Samaritain. Il est d’abord avec eux, avec nous.

Jésus va provoquer le dialogue. Dans l’original sa question est forte:  » quelle sorte de paroles vous jetez-vous l’un contre l’autre« ? La réponse des disciples est ironique. Parfois nous croyons tout savoir. Alors que Jésus est le seul qui sait! Mais nous sommes pris par les choses et avons de la difficulté à écouter.

Jésus continue à questionner: il désire qu’ils vident leur cœur, ce qui leur pèse.

Les disciples donnent alors une catéchèse…mais sans espérance. Elle n’ouvre à rien.

Un événement les a tout de même surpris: ce que des femmes leur ont dit au petit matin. Mais tout est compliqué et incompréhensible pour eux.

La résurrection de Jésus n’est pas encore la perle de grand prix qu’il faut acquérir en vendant tout, mais juste un fait divers perdu dans l’océan des possibilités.

Jésus alors prend l’initiative. Ce qu’il dit est tellement vrai pour chacun de nous: nous sommes lents à croire. Nos cœurs sont incrédules et n’écoutent pas.

Jésus explique les Écritures, mais sans entrer dans les détails. Ce sont les Actes des Apôtres qui expliciteront la prédication apostolique basée sur l’accomplissement des Écritures.

La foi est confiance, pas un système spirituel. Nous avons besoin de savoir quelque chose, certes, mais surtout nous avons besoin de la lumière du Christ. La source de notre foi doit être une connaissance illuminée par Jésus lui-même. C’est ainsi que nous devenons croyants.

Arrivés à Emmaus, Jésus respecte la liberté de disciples. Il respecte la nôtre aussi.

Autour de la table, Jésus prend maintenant l’initiative. La scène nous rappelle l’eucharistie. Nous avons tout ce qu’il faut pour le reconnaître: la Parole et le pain. Nous sommes dans la même situation que les disciples. Quand on écoute la Parole vraiment notre cœur brûle.

 

Témoins du ressuscité

De retour à Jérusalem les deux disciples partagent leur expérience de rencontre avec Jésus. Et les autres disciples leur disent : « Le Seigneur est vraiment ressuscité ! Il est apparu à Simon ! »

En un seul verset tout est dit. Tout se précipite. A Jérusalem surgit une éruption de joie. L’Eglise célèbre le Ressuscité. Rien n’est fini mais tout commence.

Cette fin est si importante : c’est la foi de l’Eglise qui est ici célébrée. Ma foi peut être petite, mais si elle s’appuie sur la foi de l’Eglise, cela suffit. La foi de la foule des témoins du Ressuscité qui nous enveloppe.

 

Prière

Il s’approcha et fit route avec eux…

Jésus
Que fais-tu?
Où te caches-tu?
Qui es-tu?
Quand je ne comprends pas,
Quand je reste sans voix, soufflé, blessé, meurtri
Devant tant d’injustices, de persécutions, de catastrophes.
Quelle est la raison de tout cela?
Pourquoi ce silence de ta part?
Pourquoi ton ciel se ferme-t-il?
Pourquoi tous ces « pourquoi »?

Ce mot, tu le connais bien: tu l’as toi-même crié
Quand ton âme s’est obscurcie :
« mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné »?
Alors je viens à toi, certain d’être entendu et compris
Au plus profond de mon être,
Puisque tu as traversé nos ténèbres.

Je renouvelle ma confiance en toi:
Tu t’approches et tu fais route avec nous.
Et dans ton silence se trouve l’explication.
Et dans ta Parole jaillit la lumière.
Et dans ton pain nos yeux s’ouvrent.
Tu es là, vivant, ressuscité,
Le ciel se découvre et nos chemins prennent sens.

Avec l’Eglise, je jubile et chante ta résurrection.

 

Prochain pèlerinage sur le chemin d’Emmaüs

Image : Les disciples d’Emmaüs. Tableau de Stig Petrone


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