prends soin de la terre

« Prends soin de toi et de la terre » ! Foi et sauvegarde de la nature

Cette perspective sur l’écologie à partir de la vision de la nature de la Bible a été donnée dans le cadre du groupe « Musulmans et chrétiens en chemin ». (par voir ici le résumé de cette rencontre). Des amis musulmans de plusieurs arrière-plan ont dialogué sur ce thème avec des chrétiens reliés au mouvement des Focolari.

Vidéo de la conférence

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Aujourd’hui le monde entier parle d’écologie. Les jeunes manifestent pour le climat. Les politiques appellent à une transition écologique. Les Églises s’engagent également. Le pape François a écrit une belle encyclique sur le sujet. Depuis longtemps le Conseil œcuménique des Églises a invité à une prise de conscience de notre responsabilité vis-à-vis de la nature, en insistant sur les liens entre la justice et la sauvegarde de la création. Eco-Eglise, une plateforme œcuménique des Églises vient d’être créée en Suisse romande.1

Sur le plan interreligieux, le réseau Green Faith met en lien de nombreux mouvements. En Islam il y a aussi des initiatives, comme la déclaration d’Istanbul en août 2015, peu avant la COP21, une contribution importante, fruit de l’action conjointe de la Fondation islamique pour l’Écologie et les sciences environnementales et d’Islamic Relief Worldwide.2

Plus près de chez nous, le calendrier interreligieux avait consacré une publication à « Écologie et spiritualités ». Il remarquait que la nature n’est pas, dans toutes les traditions religieuses, l’œuvre d’un Dieu créateur, comme dans le Christianisme et l’Islam. Toutes ne placent pas l’être humain au sommet de la création, ou au centre du cosmos. Mais, toutes les traditions affirment que le destin de la nature et celui de l’humanité sont étroitement liés.

Mais peut-être êtes-vous comme moi ? Même si je perçois l’importance du sujet, je me sens un peu dépassé par son ampleur et par ses enjeux.

Que puis-je faire à mon niveau ? Quelle contribution puis-je apporter ? Comment « cultiver son jardin », pour paraphraser le Candide de Voltaire ?

J’ai participé récemment à une soirée sur le thème « Réinventer nos jardins ».

Les conférenciers de l’Alliance vaudoise pour la nature ont proposé des actions simples pour embellir nos jardins, comme remplacer les murs végétaux formés par les thuyas et les laurelles – où il n’y a pas de vie – par des haies indigènes. Celles-ci apportent diversité de couleurs, de formes et de parfums. Elles sont un abri et une nourriture pour les animaux et attirent les oiseaux du ciel qui y viennent nicher.

Autres propositions :  fleurir une pelouse de gazon pour faire venir les papillons. Laisser un tas de bois pour attirer les insectes (vous les aurez dans le jardin au lieu de chez vous !), laisser un trou dans une barrière pour permettre à un hérisson de passer : il se régalera des limaces qui raffolent de vos salades !

Tout cela permet d’améliorer le milieu naturel (dont la moitié est menacée en Suisse) et la diversité des espèces (dont le tiers est menacé !). Savez-vous qu’il y a plus de 600 espèces d’abeilles en Suisse et que 45% des papillons peuvent vivre en milieu urbain, ce qui représente plus de 100 espèces ?

Améliorer la biodiversité est à la portée de chacun. Même si l’on n’a qu’un balcon, on peut y cultiver fleurs et légumes. Également à l’intérieur de nos habitations ! Et on se fait du bien par ce contact avec la nature ! L’association Arters avec laquelle je suis en lien, m’a stimulé à me lancer dans la permaculture.

« C’était très bon et très beau »

Cependant je ne suis pas avec vous pour vous donner un cours sur le jardinage et la biodiversité. Mais pour répondre à la question : quels sont, dans nos deux religions, la conception de la nature et les appels à la responsabilité vis-à-vis de la création dont l’être humain est le sommet ?

C’est pourquoi nous avons intitulé cette rencontre : « Prends soin de toi et de la terre » !

Tout d’abord, dans la foi chrétienne la nature est la création que Dieu aime, visite et soutient. Ma foi m’invite à la confiance envers l’œuvre de Dieu dans la nature, à l’émerveillement devant sa diversité et à me laisser rejoindre par l’amour de Dieu à travers elle.

Si le mouvement écologique actuel pouvait reconnaître et intégrer cela, ce serait une révolution !

Cette icône est intitulée Beauté de Dieu, beauté du monde. Elle a été peinte dans le cadre d’un concours artistique sur ce F336EB69 5BE4 4165 B217 2C7A6B1D2DA1 1 105 cthème organisé par la Communauté des Églises chrétiennes dans le Canton de Vaud. Cette image exprime ce que dit le premier article de la foi chrétienne :

« Je crois en Dieu, le Père tout puissant, créateur du ciel et de la terre, des êtres visibles et invisibles ».

Cette icône a en effet deux parties : le bas du sablier avec le monde visible et le haut avec les anges, le monde invisible.

Dans le célèbre premier chapitre du livre de la Genèse, la création en six jour les œuvres de création sont réparties en deux ensembles parallèles. Les jours 1,2,3 mettent en place le cadre : la lumière, le ciel, les mers et la terre.

Les jours 4,5 et 6 remplissent ce cadre en y plaçant les créatures : les astres, les animaux marins, ailés et terrestres, et l’humanité. Cela explique pourquoi les plantes précèdent la création du soleil.

Création du Cadre

Création des habitants du cadre

Jour 1 :  Lumière 

Jour 4 : Soleil, lune et étoiles

Jour 2 : Ciel et mer

Jour 5 : Oiseaux et poissons

Jour 3 : Terre et plantes

Jour 6 : Animaux terrestres et être humain

Il faudrait au moins trois conférences sur chaque jour de la création dans ce texte qui – vous l’avez compris – est une construction littéraire, et n’a donc pas de prétention scientifique.

Je me bornerai à citer le passage qui parle de la création de l’être humain, lequel montre la dignité éminente de l’homme, comme sommet de la création, le seul à avoir été créé « à l’image de Dieu » :

« Dieu créa l’être humain comme une image de lui-même ;

il le créa à l’image de Dieu, il les créa homme et femme.

Puis il les bénit en leur disant : « Ayez des enfants, devenez nombreux, peuplez toute la terre et dominez-la ; soyez les maîtres des poissons dans la mer, des oiseaux dans les cieux et de tous les animaux qui vont et viennent sur la terre. »

Et il ajouta : « Sur toute la surface de la terre, je vous donne les plantes produisant des graines et les arbres qui portent des fruits avec pépins ou noyaux. Leurs graines ou leurs fruits vous serviront de nourriture.

De même, je donne l’herbe verte comme nourriture à tous les animaux terrestres, à tous les oiseaux, à toutes les bêtes qui vont et viennent au ras du sol, bref à tout ce qui vit. » Et il en fut ainsi.

Dieu vit que tout ce qu’il avait fait était une très bonne chose. Le soir vint, puis le matin ; ce fut la sixième journée » (Genèse 1,24-29).

« La merveille que je suis » : l’écologie intégrale

« Dieu vit que c’était très bon », c’est ce que constate Dieu à la fin du récit de la création (Genèse 1,3) Or « bon » (Tov en hébreu) peut aussi signifier « beau ». « Tout était très beau ».

Ce qui frappe dans ce texte, c’est que l’univers et la nature et l’être humain font partie d’un tout.

L’être humain, s’il est le sommet de la création, n’en est pas séparé. Il est la merveille des merveilles, dès le sein maternel comme le chante le psaume : 

« Je te célèbre, car j’ai été fait de façon merveilleuse. Tes œuvres sont étonnantes, je le sais bien. Mon corps ne t’était pas caché lorsque j’ai été fait en secret, tissé dans les profondeurs de la terre. Quand je n’étais qu’une masse informe, tes yeux me voyaient. » (Psaume 139,14-15)

Aujourd’hui on parle « d’écologie intégrale » qui montre l’interrelation entre la nature et l’être humain. Bien avant le mouvement écologique moderne, le récit de la Genèse et ce psaume ont pressenti que tout est relié.

« Toutes les œuvres du Seigneur » sont appelées à le bénir, chantent les amis de Daniel. Nous allons entendre à la fin de cet exposé le cantique des créatures, tiré du livre de Daniel (3,52-90, tiré de la version grecque).  

Comme dans le récit de la Genèse, ce chant commence par le firmament du ciel, ce qui est le plus élevé et lointain, puis va vers la terre et tous les animaux et conclut par l’appel à l’être humain à bénir le Seigneur. (Daniel 3,52-90, selon la version grecque de la Septante).

Ceci donne une première indication : l’être humain est appelé à à s’émerveiller et à bénir Dieu avec et pour toute la création.

Soumettre et dominer

Selon le récit de la Genèse la vocation de l’homme est de « soumettre et dominer » les animaux. (Gen 1,28)

Mais soumettre et dominer ne signifie pas exploiter sans limites, comme on l’a compris depuis la montée de la philosophie rationaliste (sans Dieu) qui imprègne aujourd’hui nos cultures occidentales.  

C’est « cultiver la terre et la garder » (Gen 2,15), élever les animaux en les respectant, car eux aussi font partie de ce « très bon » créé par Dieu. De même la personne humaine appartient à ce « très bon et très beau ».

Pour avoir mal compris ce verbe « dominer » (la création), les Églises ont fait repentance lors du premier rassemblement œcuménique européen (Bâle 1989), confessant n’avoir « pas témoigné de l’amour de Dieu pour toutes et chacune des créatures » et n’avoir « pas adopté un style de vie qui montre que nous appartenons à la création de Dieu ».

« Nous demandons à tous les chrétiens d’Europe d’aider et d’encourager leurs Églises et leurs gouvernements à…adopter un style de vie qui soit le moins nocif possible pour l’environnement…Nous devons apprendre que notre bonheur et notre santé ne dépendent pas tant des biens matériels que des dons de la nature et des autres créatures, des relations humaines et de notre relation avec Dieu », dit encore le document final. (§87)

Dès lors les initiatives des Églises ont été nombreuses. Particulièrement importante est l’instauration d’un « temps de la création » entre le 1er septembre (date du début de l’année liturgique dans l’Église orthodoxe) et le 4 octobre, fête de François d’Assise, chantre de la création.

Au début de l’année dernière le Document sur la fraternité humaine pour la paix mondiale et la coexistence humaine, signé par des représentant de nombreuses religions, en particulier par le pape François et le grand imam Al-Tayeb, d’Al-Azahr, ont aussi fait le lien entre la fraternité et la création, en déclarant que :

« Le premier et le plus important objectif des religions est celui de croire en Dieu, de l’honorer et d’appeler tous les hommes à croire que cet univers dépend d’un Dieu qui le gouverne, qu’il est le Créateur qui nous a modelés avec Sa Sagesse divine et nous a accordé le don de la vie pour le préserver. Un don que personne n’a le droit d’enlever, de menacer ou de manipuler à son gré ; au contraire, tous doivent préserver ce don de la vie depuis son commencement jusqu’à sa mort naturelle. C’est pourquoi nous condamnons toutes les pratiques qui menacent la vie comme les génocides, les actes terroristes, les déplacements forcés, le trafic d’organes humains, l’avortement et l’euthanasie et les politiques qui soutiennent tout cela ».

Aujourd’hui, vous le savez bien, de grandes questions se posent au sujet du sens de la conjugalité et du début et de la fin de la vie humaine. Or certaines décisions politiques suscitent l’inquiétude de ceux qui croient à un « ordre de la création ».

Devant l’« urgence climatique » proclamée aujourd’hui on ne peut se contenter d’une écologie qui ne concernerait que le climat et l’environnement, sans tenir compte de la nature et de la dignité de la personne, depuis le premier battement de son cœur jusqu’au dernier.  

La science doit rester au service des personnes, en particulier des plus vulnérables et démunies.  

S’engager pour l’écologie intégrale signifie garder à l’esprit que l’être humain est le sommet de la création et qu’il doit être respecté, comme le reste de la création doit être respecté.

En ce qui concerne les animaux, notez en passant – et de manière provocatrice – que le plan originel de Dieu ne prévoyait pas l’abattage des animaux. Adam devait se nourrir uniquement des produits de la terre (Gen 1,29). Ce n’est qu’après le déluge que Dieu a permis cela ! (Gen 9,3)

Cela doit nous faire réfléchir sur notre consommation démesurée de viande. Sa production industrielle non seulement est une offense aux animaux aimés par Dieu mais dérègle aussi complètement l’agriculture. En outre, manger trop de viande est mauvais pour notre santé.

 Dieu est père avant d’être créateur

« Je crois en Dieu, le Père tout puissant, créateur du ciel et de la terre ». 

En effet ma foi me dit que Dieu, avant d’être créateur est un Père qui aime. Avant que je sois créé, j’étais dans le coeur de mon Père céleste. J’étais aimé par lui avant d’exister, avant même que l’univers soit créé. Comme le dit le beau chant de Samuel Olivier

« Bien avant le chant qui créa l’univers, Bien avant l’Esprit qui planait sur la terre, Bien avant que tu me formes de la poussière, Tu rêvais du jour où tu pourrais m’aimer. »

Jésus le chante aussi dans l’Évangile que nous avons lu tout à l’heure quand il dit que le Père céleste nourrit les oiseaux du ciel (Math 6,26). Et nous valons beaucoup plus qu’eux. Toute la création est traversée par le fil d’or de l’amour de Dieu.

Ce même fil d’or nous a tissés et ne cesse de le faire. C’est pourquoi nous avons à prendre soin de la création et par-dessus tout les uns des autres, nous qui sommes très aimés de Dieu qui prend soin de nous.

Mais pour découvrir ce fil d’or nous avons à changer de regard. Et nous changeons de regard quand nous faisons l’expérience de l’amour de Dieu en vivant sa Parole.

A ce sujet j’aimerais évoquer l’expérience que Chiara Lubich, la fondatrice du Mouvement des Focolari, et ses premières compagnes ont vécue durant l’été 1949. Elles sont entrées dans une nouvelle relation avec la nature justement après avoir vécu intensément la Parole de Dieu.

Voilà ce que C. Lubich écrit dans le Paradis de 1949, un texte mystique étonnant qui réfléchit sur cette expérience :

« Quand une Parole tombait, il nous semblait qu’elle s’enflammait…Un feu spirituel brûlait en nous ». (§8)

Ainsi lorsque ces jeunes femmes ont décidé d’aller dans les magnifiques montagnes des Dolomites pour se reposer, elles ont constaté que la conséquence de cette vie de la Parole est que leur regard sur la nature avait changé. (Sur la place de la nature dans le « Paradis de 1949 », voir mon étude ici)

Dans un texte magnifique qu’il vaut la peine de citer, Chiara Lubich, grâce à la transformation que la Parole de Dieu avait opérée en elle, perçoit la présence de Dieu sous toutes choses :

« Tout était flamme non seulement en moi mais aussi, d’une certaine façon, en dehors de moi. Je percevais, sans doute à cause d’une grâce spéciale, la présence de Dieu sous toutes choses. De sorte que, si les pins étaient dorés par le soleil, si les ruisseaux scintillaient en cascadant, si les marguerites, les autres fleurs et le ciel entier étaient en fête à cause de l’été, plus forte encore était la vision d’un soleil qui brillait sous toute la création. Je voyais, me semblait-il, Dieu qui soutient, qui régit toutes choses.

Et Dieu sous toutes choses changeait notre regard sur elles : elles étaient toutes liées entre elles par l’amour, toutes – pour ainsi dire – éprises l’une de l’autre. De sorte que, si le ruisseau se jetait dans le lac, c’était par amour. Si un pin se dressait à côté d’un autre, c’était par amour. (§16-18).

Dans l’expérience et la pensée de Chiara Lubich, pour percevoir que l’amour de Dieu relie tout dans la création, il faut vivre la Parole de Dieu, en aimant. Pour voir Dieu à l’oeuvre, il faut demander à Dieu de changer notre cœur et notre regard et de nous donner la foi en lui.

C’est ce que dit aussi la Bible : « Par la foi, nous comprenons que l’univers a été formé par la parole de Dieu, de sorte que ce qui est visible a été fait à partir de ce qui est invisible » (Hébreux 11,3)

 Avant tout, pour Chiara Lubich, le chemin pour la formation d’une conscience écologique est l’amour. Cette vision écologique, implicite dans le Paradis de 1949, Chiara la développera par la suite. Pour elle, il faut acquérir le regard amoureux de Dieu sur toutes choses « Tout doit être traité avec l’amour du Père pour le Fils : un grand cœur et le sourire de Dieu sur les choses à travers notre regard ».

De même l’écologie est un acte d’amour envers nos enfants et les enfants de nos enfants qui nous suivront :

« Retrouver une relation harmonieuse avec la nature est pour nous un acte d’amour envers l’humanité de demain. De la même façon que nous vivons pour les autres aujourd’hui, nous devons travailler pour nos frères qui viendront ». (Nature et vie physique, Nouvelle Cité, Montrouge, 2000, p. 118,89)

J’aimerais résumer mon propos et le conclure sous une forme méditative :

Dieu est créateur des choses visibles et invisibles,
sa bonne main caresse les œuvres qui chantent sa beauté.
Il est le Dieu d’amour présent dans toute sa création.
Qui pourrait connaître la profondeur de ses pensées ?

Il est proche de chacun de nous
et il a magnifié la dignité humaine en élevant les humbles.
Il nous attend dans les plus petits de nos sœurs et frères.

Il est partout présent et pénètre tout.
Il nous a fait de façon merveilleuse dans le sein maternel
et veut nous faire renaître à sa vie.

Durant ce chant de la communauté de Taizé

nous pouvons nous tenir devant lui

et invoquer sa miséricorde.
Qu’il pardonne nos fermetures à son amour
et les blessures infligées à sa création !
Qu’il nous donne de prendre soin

de la terre, de nous-mêmes et les uns des autres!

[1] Pour une analyse de l’importance de l’écologie pour l’unité chrétienne, voir Priscille de Poncins, Comment habiter la terre ensemble ? En Michel Mallèvre, éd. L’unité des chrétiens. Pourquoi ? Pour quoi ? Cerf, Paris, 2016, p. 163-175

[2]

Cf Emanuel Pisani, Ecologie en Islam et dialogue interreligieux, Transversalités, Oct.-déc. 2016, n° 139, p. 59. Pour une étude sur l’écologie et le dialogue interreligieux, voir Agnès KI Mi-Jeung, L’impact de la crise écologique et du dialogue interreligieux sur la théologie chrétienne, Recherches de Science Religieuse 2012/1 (Tome 100), p 85-104 ; Laurent Dervieu, éd. Dialogues interreligieux pour une éthique de l’environnement, L’Harmattan, Paris, 2016


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