Vivant

Jésus au milieu de nous

« Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux »

            Quel témoignage donnons-nous de la présence de Jésus dans un monde où il paraît si absent? Dans les conflits passés et présents, les chrétiens ont leur part de responsabilité. Que de violences ont été commises entre personnes baptisées!

Comment reconnaître la figure de Jésus, le Prince de la Paix, quand ceux qui portent son nom n’arrivent pas à donner un témoignage commun. N’est-il pas alors urgent, à l’heure où les religions sont soupçonnées d’être davantage des facteurs de violence que des instruments de paix, de tracer un chemin d’espérance?

            Face à tous ces défis, nous pouvons nous sentir impuissants. Nous pouvons accuser les autres, les politiciens et ceux qui détiennent les richesses de ce monde. Pourtant chacun peut apporter une contribution pour rendre l’air plus respirable entre les hommes. En fait, nous dit Jésus, un monde nouveau commence lorsque deux ou trois se mettent d’accord et se rassemblent en son nom.

Là où deux ou trois.

            Deux ou trois, cela signifie accepter de sortir de soi-même. Lorsque je suis seul, je peux vite me décourager. Ou bien je peux aussi être plein d’illusions, malgré ma bonne volonté. Je peux confondre l’appel de la Parole de Dieu avec mes propres désirs, mes idées, l’influence de mon éducation et de la culture.

            Combien de fois ai-je été moi-même piégé. Croyant percevoir un appel de Dieu, je ne suivais en fait que mes propres inclinations. J’ai alors appris à ne plus prendre de décisions sans consulter d’autres  personnes, ou moins une ou deux personnes en qui je fais confiance. Avez-vous sur dans votre vie ces personnes de confiance? Sinon demandez au Seigneur d’en placer une ou deux sur votre chemin!

            Peut-on vivre sa foi de manière isolée? Jésus veut que ses disciples vivent en communauté, se rencontrent, se voient, se parlent, se soutiennent, s’épaulent, se lavent les pieds. Ces paroles prennent un relief particulier aujourd’hui où les moyens de communication peuvent nous donner l’illusion  d’être en lien avec le monde entier, mais ne nous font pas communier.

            Une dame dit un jour à son pasteur : « Je n’ai pas pu venir au culte, ces dernières semaines, car j’avais beaucoup de travail, mais j’étais présente en esprit. » ce à quoi le pasteur répliqua: « C’est bien, mais la prochaine fois, tâchez de venir avec votre corps ».

            Etre ensemble est une source de bénédictions. Lorsque grandit l’unité entre nous alors grandit aussi la présence du Christ, qui contient toutes les bénédictions de Dieu. Toutefois, Jésus ne parle pas d’une quelconque réunion, mais d’être ensemble dans la foi. Si nous nous réunissons pour critiquer les autres ou nous brancher sur radio-Vipère, ce n’est pas le genre de rencontre qui nous fera du bien. Jésus nous donne quelques conditions pour nous rencontrer dans son esprit.

            D’abord dans le verset précédent, il dit que nous avons à unir nos voix. Le texte grec est très beau, car il dit : « chanter de la même voix » ou « chanter en symphonie ». L’Eglise est comme un grand arbre où il y a beaucoup d’oiseaux différents qui chantent avec leur tonalité. Il s’agit d’écouter tous les tons et non d’en exclure, parce que telle ou telle voix ne nous convient pas. Chacun a à apporter sa voix propre, sa tonalité particulière, qui ne ressemble pas aux autres: le catholique a la sienne, le réformé a la sienne, l’évangélique a la sienne, l’orthodoxe a la sienne. Lorsque nous sommes ensemble nous cherchons non pas à supprimer nos traditions, mais à les accorder les unes autres, à les mettre en symphonie. Nous cherchons à chanter une mélodie commune avec nos différentes voix.

« Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux »

            Une deuxième condition est de se réunir en son nom. Que veulent dire ces trois petits mot « en mon nom« ?  Ce n’est pas le simple fait de se réunir qui compte; ce n’est pas le simple fait d’être héritiers d’une tradition religieuse familiale ou culturelle; ce n’est pas même la prière adressée à Dieu qui permet de goûter à la présence de Jésus. En effet, il nous dit : « Pourquoi m’appelez-vous Seigneur, Seigneur, et ne faites-vous pas ce que je dis ? » Qui sont alors ces deux ou trois? Ce sont d’abord des frères et des sœurs, qui considèrent l’autre comme supérieur; ce sont des amis dont l’amitié est fondée dans le Christ, notre grand ami. Et surtout ce sont des amis qui sont unis dans le désir commun de chercher par-dessus tout la volonté de Dieu. Etre ensemble dans le nom de Jésus signifie vivre selon sa volonté

            Or quelle est la volonté suprême du Christ? En lisant l’Evangile, nous savons que son plus grand désir – « son » commandement nouveau – est que l’amour réciproque règne parmi nous. Ainsi là où au moins deux personnes sont prêtes à vivre selon cette volonté et faire tout passer au second plan pour susciter sa présence, tout change autour d’elles. Jésus entre partout où on le laisse entrer. Et la clé pour qu’il ouvre les serrures de nos maisons et vienne s’asseoir à nos tables, c’est l’amour réciproque. Jésus est présent là où nous l’établissons explicitement et le renouvelons continuellement.

« Là où deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis au milieu d’eux »

            Depuis plus de 40 ans que je suis devenu chrétien, je peux témoigner que cela est vrai. Je fais l’expérience de la présence de Dieu quand il y a unité entre les personnes. Quand nous sommes unis, Jésus est là. C’est la chose la plus précieuse que j’ai appris à découvrir, mais aussi la réalité la plus fragile, car on a vite fait de congédier Jésus par nos duretés, nos fermetures et nos critiques. Jésus présent au milieu de nous est la perle de grand prix. C’est lui qui compte, plus que tous les trésors de notre cœur, plus que tous nos biens, plus que toutes nos affections, plus que la beauté de la nature, plus que l’art et la musique, plus que tout.

            Mais quand Jésus n’est plus là alors tout n’est que ténèbres; les choses les plus précieuses perdent de leur valeur. S’il n’y a pas l’amour, alors nous ne sommes rien.

            Qui est-il, ce Jésus qui nous dit « Je suis au milieu de vous »? C’est par sa résurrection que Jésus continue à être présent. Avec sa résurrection, la condition de Jésus se transforme. Il n’est plus soumis au temps et à l’espace, mais les contient en lui-même. L’univers physique et humain lui est intérieur. C’est lui qui relie toutes les choses et les réunit. C’est lui qui suscite la communion entre les hommes et les fait un en Dieu. Quand il est là, il apporte feu et lumière, comme dans le tabernacle des israélites dans le désert. Quand il est là les promesses lues dans le texte de l’Apocalypse deviennent déjà une réalité: il apporte vie et guérison, fécondité et clarté. Quand il est là, on ne peut plus dire du mal les uns des autres, ni critiquer son frère derrière son dos. Quand il est là on se bénit, on dit du bien, on met en valeur sa sœur, on souligne tout le positif chez l’autre, dans la tradition, dans l’Eglise de l’autre.

            Augustin, un grand évêque des premiers siècles disait que l’unité des chrétiens est le lieu où habite et agit l’Esprit saint. Plus l’unité est grande, plus la présence de Dieu est grande. Cette présence grandit lorsque l’unité grandit. .

            Mais nous savons bien que rien n’est facile. Ou plutôt qu’il est très facile de démolir des relations de confiance. Il faut toujours recommencer. La recherche de l’unité n’est pas l’effort d’un jour mais de toujours.

            Commençons et recommençons toujours, là où nous sommes, avec les deux  ou trois personnes que nous rencontrons à vivre de telle manière que Jésus soit présent au milieu de nous. Nous apporterons ainsi notre contribution à ce monde qui ne connaît pas la paix.

Image : action de Pâques des Eglises de Paris, 2019.


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