Se changer soi meme

Qu’est-ce que la « repentance »?

Le 5 juillet dernier, j’ai participé à un moment historique pour les Eglises catholique et protestantes. C’était dans l’Eglise de Wittenberg, où Martin Luther a prêché la Réformation la plus grande partie de sa vie. Une déclaration commune sur le sens de la justification par la foi a été signée entre les Eglises catholique, luthérienne, méthodiste et réformée.

Cela a été un grand pas en avant vers davantage d’unité visible entre chrétiens. Se mettre d’accord sur un point qui a divisé la chrétienté au 16e siècle est source de grande espérance.

Or, dans le chœur de l’Eglise de cette Eglise, la première des 95 thèses de Martin Luther est écrite sur une paroi : « En disant : Faites pénitence (Matthieu 4:17), notre Maître et Seigneur Jésus-Christ a voulu que la vie entière des fidèles fût une pénitence. »

L’enjeu pour Luther était le sens de la repentance (pénitence). Est-ce que la phrase latine « Poenitentiam agite » signifie ‘faire pénitence’ comme une action pénitentielle externe, ou ‘se repentir’ comme un changement de cœur interne ?

La repentance, concluait-il, signifie un changement de cœur, un style de vie de cœur changé.

C’est ce qu’exprime le symbole préféré de Luther : la rose qui contient un cœur traversé parLuther rose La Croix du Christ.

Quand Luther parle de pénitence, il parle de ce changement du cœur, de ce cœur nouveau qui est annoncé par le prophète et qui advient lorsque nous reconnaissons nos fautes et changeons de style de vie à cause du Christ.

Quand le coeur est touché, notre vie change, fleurit comme une rose et porte un fruit de justice. 

C’est ainsi qu’il faut comprendre l’appel du Christ tout au début de son ministère : « Changez radicalement (convertissez-vous, repentez-vous), car le règne de Dieu s’est approché » (Matthieu 4,17)

C’est chaque jour qu’on à se repentir, à demander pardon pour ses fautes.

Martin Luther l’a exprimé par cette maxime : « Simul semper justus et peccator ». « toujours à la fois juste et pécheur ». Mais il ajoutait aussi – et on l’oublie parfois …et penitens : « Toujours à la fois juste, pécheur et pénitent ».

C’est chaque jour que nous avons à changer notre coeur, combattre contre le mal en nous et autour de nous. Ce mal qui est aussi dans les structures d’injustices de ce monde.

Paul en a fait l’expérience. Il le dit avec force : « Je ne fais pas le bien que je veux, mais je pratique le mal que je ne veux pas » (Romains 7,19). Tout ce chapitre 7 de la lettre aux Romains montre que le chrétien doit mener quotidiennement ce combat conre le mal, en lui est hors de lui.

Comme c’est chaque jour que nous demandons le pain et pardon quotidiens dans la prière du « Notre Père ». 

Dans une rencontre œcuménique à Fribourg sur le Saint Esprit, le mois dernier, on a demandé à l’archevêque anglican de Canterbury, Justin Welby, de dire un cadeau qu’il a reçu de l’Eglise catholique et à l’archevêque catholique de Vienne, le cardinal Christoph Schönborn, de dire un cadeau que les Eglises protestantes ont donné à l’Eglise catholique. Il a répondu : l’appel à la repentance !

Dans le premier interview qu’il a donné, le pape François a répondu à cette question  « Qui êtes-vous » ? en disant : « Je suis un pécheur » !

Il est un disciple de l’apôtre Paul !

Il a pris au sérieux l’appel à la repentance lancé par Jésus et relayé par Luther.

Une confession des péchés attribuée à Jean Calvin dit cela. Elle est tellement forte et radicale qu’on ne la lit plus. Mais elle dit bien combien le péché est une puissance incrustée en nous. Il nous fait replier sur nous-mêmes. Il est une force de transgression contre laquelle nous avons à exercer une vigilance constante et un combat spirituel permanent :

 » Seigneur Dieu, Père éternel et tout-puissant, Nous reconnaissons et nous confessons devant ta sainte majesté que nous sommes de pauvres pécheurs.

Nés dans l’esclavage du péché, enclins au mal, incapables par nous-mêmes de faire le bien, nous transgressons tous les jours et de plusieurs manières tes saints commandements, attirant sur nous, par ton juste jugement, la condamnation et la mort… »

 

Comment s’en sortir ?

« Misérable que je suis ! Qui me délivrera de ce corps de mort ? » s’écrie Paul ! (Romains 7,24)

Mais il ajoute à la fin de ce chapitre : « Grâce soit rendue à Dieu par Jésus-Christ, notre Seigneur ! »

C’est le sens de la justification par grâce par le moyen de la foi.

Lorsque nous nous tournons vers Jésus mort et ressuscité pour nous et mettons notre entière confiance en lui, non seulement nos péchés sont pardonnés, mais nous sommes aussi libérés. L’Esprit saint agit en nous pour que nous accomplissions des œuvres de justice.

Voici ce qui a été affirmé d’un commun accord par les protestants et les catholiques à Wittenberg, le 5 juillet dernier :

« La justification signifie que le Christ lui-même est notre justice, car nous participons à cette justice par l’Esprit saint et selon la volonté du Père.

Nous confessons ensemble: c’est seulement par la grâce au moyen de la foi en l’action salvifique du Christ et non sur la base de notre mérite que nous sommes acceptés par Dieu et que nous recevons l’Esprit saint qui renouvelle nos cœurs, nous habite et nous appelle à accomplir de bonnes œuvres ».

Oui, lorsque nous croyons de tout notre coeur dans Christ vivant nous recevons l’Esprit saint.

Notre vie consiste désormais en deux choses : embrasser le Christ par la foi. Et invoquer l’Esprit saint.

 

Croire, c’est embrasser le Christ et invoquer l’Esprit

Embrasser le Christ!

Je vous rapporte ici l’histoire d’une enfant à qui on a parlé de Judas, de sa trahison et de son suicide. Cette enfant eut ces mots étonnants: « Moi si j’avais été Judas, je me serais pendue…Je serais pendue au coup de Jésus »!

Merveilleuse intuition de l’enfant qui rejoint ce qu’écrivait déjà S. Augustin: « Si tu veux fuir la colère de Dieu, cours te jeter dans ses bras« !

Tableau Sibiu

Martin Luther dit aussi que la foi c’est embrasser le Christ. C’est accueillir son amour, les mains vides, qui ne peuvent que saisir ce que Dieu donne.

J’aime ce tableau dans la cathédrale luthérienne de Sibiu en Transylvanie qui dit cela de manière très vivante. On y voit des bras qui embrassent la Croix de Jésus.

La foi accueille la déclaration d’amour de Dieu: il nous dit tu es aimé, tu es beau et bon, tu es dans la vérité, si tu embrasses le Christ.

« Car en effet, les pécheurs sont beaux parce qu’ils sont aimés, ils ne sont pas aimés parce qu’ils sont beaux » (Controverse tenue à Heidelberg, 1518, 185, thèse XXVIII).

Magnifique synthèse, en une ligne, de la substance de l’Evangile: tu n’es pas aimé parce que tu es beau, mais tu es beau parce que tu es aimé!

Cela, tu dois le croire de toutes tes forces, de toute ta pensée, de tout ton amour. Et vivre en cherchant le Royaume de Dieu et sa justice…sinon rien ne se passe dans ta vie!

 

Puis invoquer constamment l’Esprit saint!

Si nous avons chaque jour à reconnaître et confesser nos fautes, nous avons surtout à nous tourner vers Jésus Christ et à invoquer sans cesse l’Esprit saint.

Après avoir fait le constat de sa faiblesse, Paul parle de la vie dans l’Esprit saint dans le chapitre qui suit (Romains 8)

La vie chrétienne est donc une continuelle invocation de l’Esprit.

La vie dans l’Esprit est le style de vie chrétien.

Sans lui aucune vie et aucun progrès spirituels ne sont possibles.

 

Esprit saint

Par toi Jésus est le Messie débordant de tous tes dons.

Par toi il s’est donné en aimant jusqu’au bout.

Par toi il est ressuscité des morts au troisième jour.

Par toi il est au milieu de deux ou trois se rassemblant en son nom.

Par toi il nous rencontre quand nous écoutons son Evangile.

Par toi il nous attire à lui dans son baptême d’eau et d’Esprit.

Par toi il nous rassemble dans son repas comme membres de son Corps.

Par toi il nous nourrit à travers le pain et le vin de la Cène.

Par toi il nous pardonne et nous guérit, nous libère et nous unit.

Par toi il nous envoie dans ce monde que tu soutiens et aimes.

Par toi il nous attend dans le plus petits pour les servir et les relever.

Par toi il nous ouvrira la porte du ciel et nous donnera le baiser de paix.

Par toi il nous accueillera dans son Royaume et ressuscitera nos corps mortels.

Béni sois-tu, Esprit qui procède du Père par le Fils !

Que mon cœur te sanctifie sans cesse !

Que ma bouche t’invoque sans relâche !

Que mes mains s’élèvent toujours vers toi !

 

« Convertissez-vous, car le Royaume de Dieu est proche » (Matthieu 4,17)
Seigneur, voici tes premières paroles à l’humanité.
Par elles tu nous dis que l’important est la transformation de notre cœur.
Tu attends cela de nous non seulement le premier jour, mais chaque jour.
Tu nous appelles à nous détourner d’une vie centrée sur nous-mêmes
pour nous tourner vers Dieu.
Car nous le reconnaissons : nous ne faisons pas le bien que nous voulons,
mais pratiquons le mal que nous ne voulons pas.
Qui nous délivrera de cette puissance du mal,
sinon Toi, le seul Saint mort pour nous en délivrer ?

Seigneur, nous croyons en toi.
Viens au secours de notre faible foi !
Nous croyons que ton Royaume est proche.
Tu es ressuscité, vivant parmi nous :
avec toi nous ne serons plus jamais seuls.
Tu nous a aimés jusqu’à l’extrême :
en toi nous pouvons aussi aimer.
Tu répands ton Esprit sans mesure :
Par lui nos cœurs sont transformés.

Dans ce moment de silence, viens nous redire à chacun personnellement :
« Convertis-toi, car le Royaume de Dieu est proche » !

 

Martin Hoegger


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